Depuis le début de la semaine, les clients se bousculaient au portillon, tous plus amochés les uns que les autres. Cette recrudescence d'activité, Asphodèle l'imputait au coup de filet pas si brillant que ça du Ministère de la Magie. On ne s'attaque pas à un réseau de grande ampleur en croyant couper les tentacules, seule la tête comptait, et la tête semblait toujours leur échapper. Mais il fallait bien que le crime profite à quelqu'un. D'ordinaire, Asphodèle n'était pas une "profiteuse". La seule idée la révulsait. Elle valait bien mieux que ça pour faire son bonheur du malheur de quelques pauvres hères qui s'étaient senti une poussée d'adrénaline devant des gros bonnets de la mafia londonienne. D'ailleurs à y bien regarder, elle ne profitait pas tant que ça puisqu'elle faisait payer ses clients uniquement pour ne pas attirer l'attention en pratiquant des tarifs défiants toute concurrence. Les gallions qu'elle entassait dans son coffre, de l'autre côté de la rue, étaient là juste au cas où. Elle ne tapait dedans que pour s'acheter du lait (qu'elle partageait avec son chat), du miel et des épices, rien d'autre, puisque de toute manière elle n'avait pas la possibilité de sortir.

Replaçant la fiole de polynectar tandis qu'elle prenait peu à peu l'apparence de Mrs Wolfsbane, la jeune femme soupira. Ce n'était pas exactement le genre de vie à laquelle elle aspirait. Se cacher sans cesse était pourtant devenu son lot quotidien. Elle passa devant un miroir, observant cette femme d'une quarantaine d'année qui lui rendait son regard. Autrefois, elle se serait passée de potion, s'en remettant uniquement à ses talents de métamorphomage. Aujourd’hui la magie la quittait peu à peu, il fallait donc qu'elle assure ses arrières autrement. Une chance pour elle que les potions et la botanique aient toujours étaient une passion...

Elle entendit la porte de sa boutique s'ouvrir. La personne qui venait d'entrer avait la moitié de la joue méchamment entamée et la plaie saignait abondamment. Avec la Veuve Noire qui sévissait dans le tout Londres, même sur le marché aux trolls tout le monde n'était pas tranquille, et d'ailleurs certains auraient refusé de rafistoler les jouets de la Veuve, mais pas Asphodèle. Elle n'avait pas grand chose à perdre...

- Je ne vous demande pas en quoi puis-je vous être utile..., fit-elle d'un ton égal.

Derrière son comptoir, elle choisissait déjà l'un de ses baguettes les plus dociles pour la chirurgie...